L’histoire des bâtons de processions
Les bâtons de procession sont ces petites statues de trente à quarante centimètres, posées sur un socle en berceau et représentant un saint dont la dévotion rapporte un intérêt contre les maux de la nature, maladies ou sécheresses, affectant les personnes comme les récoltes. Elles sont entourées d’autres personnages, en général de petites représentations d’anges.
Des deux bâtons que l’on peut trouver à Daix, l’un témoigne de l’existence d’une confrérie et l’autre, simple patron de paroisse, voyageait de famille en famille pour apporter sa bénédiction.
Saint Sébastien est le premier et saint Laurent est le second ; tous les deux doivent venir de la même époque, probablement de donateurs proches puisqu’on y retrouve les mêmes armoiries, au moins partiellement.
Saint Laurent
il faut, avant toute chose, savoir qu’avant d’être dans des coffres forts, les bâtons étaient installés dans des sortes de châsses en bois, simples vitrines destinées à leur rangement.
Sur le fond de celle de notre saint figure une inscription dont certaines parties sont effacées, volontairement selon certains chercheurs. On peut cependant lire : « En mil sept cent quatre vingt quatre, Bouhin, jardinier de M. le président Fardel a donné pour don une châsse neuve à saint Laurent et a fait repeindre le bâton. Il se recommande des prières de tous les bâtonniers. »
Par ailleurs, les vêtements sacerdotaux qu’il porte sont significatifs du XVIIème siècle. Le saint tient d’une main la palme du martyr et de l’autre, l’objet même de ce martyr, un gril sur lequel la légende veut qu’on l’ait fait mourir par le feu. De chaque côté, des angelots tiennent des bougeoirs en forme de corne d’abondance ainsi qu’il est souvent constaté dans les bâtons de procession.
Ces angelots, très différents de ceux rencontrés dans les retables du XVIIIème siècle, ne sont pas seulement là dans un souci esthétique, par ailleurs indéniable. Ils signifient la présence au paradis du saint auquel ils se réfèrent et représentent les raisons même de leur culte, les espérances de leur méditation et les largesses méritées. Bien souvent, les socles ne correspondent pas aux statues, quand ils n’ont pas tout simplement disparu.
Le socle de saint Laurent est particulièrement imposant par sa taille et par son ornement : il fait presque de l’ombre à la statue, manifestant le désir peu discret des donateurs de montrer leur générosité auprès de tous les paroissiens. Donateurs dont l’origine se manifeste par la présence d’écussons jumeaux (de forme ovale, 5 cm de diamètre) qui représentent en relief les détails de leurs blasons.
Il semble indiscutable, d’après tous ces éléments, que le Saint a été donné par Nicolas Fevret, époux de Catherine Jaquot, seigneur de Daix entre 1698 et 1730.
La tradition locale veut que, depuis plusieurs siècles, la statue de saint Laurent soit abritée chez l’habitant dont elle devient l’hôte pendant toute l’année. Il en est encore ainsi aujourd’hui. On assurait jadis qu’en échange de cette hospitalité, le saint faisait accorder des grâces à la famille qui l’hébergeait et, si c’était un jeune ménage, il lui faisait obtenir de la Providence l’accroissement de sa descendance.
Il s’agit plus aujourd’hui d’un acte d’appartenance à la communauté chrétienne.
Saint Sébastien
la tradition orale nous dit qu’il représentait une confrérie, une société d’entr’aide entre viticulteurs qui se rendaient service les uns les autres.
En bois doré, il porte les armes des Jaquot et date d’une époque où, selon toute vraisemblance, cette famille n’était pas encore ruinée et n’avait pas du remettre ses biens aux Fevret. Le saint Sébastien semble donc plus ancien que le saint Laurent et dater d’avant 1698.
La confrérie de saint Sébastien n’était certainement pas très nombreuse car, à Daix, il n’y avait que 30 feux. Elle semblait en outre ne regrouper que des hommes adultes, plus particulièrement les vignerons.
Le personnage représenté ressemble plus à un Bacchus antique qu’à un saint chrétien et adopte une position plus que singulière : une jambe rejetée en arrière et un bras élevé au-dessus de la tête, il semble prendre son élan pour sautiller.
Les angelots sont là pour rappeler l’univers paradisiaque de la scène. Sébastien n’est pas en train d’endurer les flèches (qui comme les liens apparaissent comme des accessoires secondaires) de ses bourreaux, il est au paradis et intercède pour nous. La souffrance n’est pas ici à l’ordre du jour mais plutôt les danses et la joie.
Extrait de l’ouvrage de Jean Lamblot « Autrefois les saints ».